Une brève de Nathalie Dollez, sur L'époque des traumatismes, de Colette Soler

 

La récente publication des Éditions Nouvelles du Champ lacanien, L’époque des traumatismes, réunit dans la collection Opuscule$ deux productions orales de Colette Soler, l’une datant de 1998 et l’autre de 2002. On les lira en édition bilingue, avec une préface de P. Barillot.

Chacun de ces textes développe deux axes essentiels pour s’y retrouver dans le traitement des traumatismes. L’un concerne les effets du discours sur le parlêtre qui fait face aux traumatismes et le second souligne la distinction entre le traumatisme structurel de l’être de langage, à savoir sa détresse d’origine face à l’Autre, et les bio-traumatismes, ceux qui menacent la vie et qui semblent exclure une quelconque participation subjective du sujet.

La fonction d’un discours est toujours discours écran entre les sujets et le réel, rappelle Colette Soler. Les deux exemples littéraires (Shakespeare et Jünger) qu’elle déplie mettent en lumière comment un discours, dans sa fonction d’écran, conditionne les satisfactions pulsionnelles des sujets, et par conséquent le champ des jouissances. Cette double propriété d’un discours, écran et voie de conduction des pulsions, nous permet de réfléchir à l’époque actuelle dans laquelle le recours à l’Autre en cas de malheur ne s’adresse plus à un Autre divin, à la volonté inaccessible, mais à un Autre réparateur des dommages, bien accessible celui-ci, même s’il ne peut enrayer définitivement le non-sens afférent au réel. En tentant de protéger plus largement les sujets modernes des bio-traumatismes, l’époque les rend plus perméables à ceux-ci.

 

Il faut aussi signaler l’éclairage apporté par Colette Soler sur le PTSD (Post-traumatic stress disorder) actuel, nouvelle nomination de l’après-coup freudien. Le gros plan qu’elle fait sur la structure de forclusion de l’évènement traumatique rend lisible ses formes hallucinatoires et permet de complexifier le PTSD en le désossant du déterminisme unifiant qui fait rentrer tout traitement des traumatismes dans des protocoles se passant de l’implication subjective des sujets, nécessaire au transfert.

 

De quoi permettre aux psychanalystes de penser leur pratique et de l’orienter.

 

Nathalie Dollez 

 

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