Brève sur Une expérience du contraire. L'analyse de Philippe Madet, par Adèle Jacquet-Lagrèze

Le titre à lui seul reflète cette position de l’analyste que Philippe Madet incarne de manière vivante dans son livre : … Une expérience du contraire… de quoi ? Points de suspension qui font sonner le silence d’avant et le silence d’après qui appellent une réponse. Un avant temporel qui est parfois le vécu d’une catastrophe que l’on voudrait effacer, sauf à le suivre dans sa proposition : L’analyse qui permet de « répondre en ayant sans cesse question à tout[1] », et relever l’offre pas si facile « de parler de ce qui cause[2] ».

Comme l’entraîne une analyse, Philippe Madet nous exhorte à « une éthique de l’exil[3] », pour entrer dans la lecture et découvrir les déclinaisons de ce « contraire » qui n’est point une contradiction, mais vient surprendre la contrariété qui précède l’acte. Contrariété de notre symptôme comme celle de nos perceptions, que nous peinons à ne pas laisser être récupérés[4] par nos fixions.

Ce cheminement nous permet d’entendre l’écho singulier de cette « dicte solitude[5] », « qui d’une rupture de l’être laisse trace[6] », et que l’analyse permet de lire, pas tout seul, comme le témoigne Camille Laurens en dialogue avec l’auteur, pour qui « une sollicitude remplace la solitude[7] ». Et c’est avec lalangue sienne, riche en métaphores communicatives, et en dialogue avec les poèmes que sont les artistes et analystes qui firent pour lui rencontre, que Philippe Madet convie chacun, analysant comme analyste à réinterroger en quoi l’analyse vient au contraire d’une réponse universelle qui dicte, « découvrir les ombres, […] étirer l’énigme[8] ».

Devant ce sur quoi « on ne peut parler », il nous invite à ne point reculer et en écho de Paul Valéry face au vent qui se lève[9], nous propose ce devoir éthique de « tenter de dire[10] » !

 

 

Adèle Jacquet-Lagrèze

 

[1] Ibid., p. 56.

[2] Ibid., p. 27.

[3] Ibid., p. 45.

[4] Ibid., p. 47.

[5] Ibid., p. 41.

[6] J. Lacan, Le Séminaire, livre XX, Encore, Paris, Seuil, 1975, p.109.

[7] P. Madet, Une expérience du contraire, op. cit., p. 86.

[8] Ibid.,  p. 94.

[9] P. Valéry, « Le cimetière marin », Charmes, Paris, Larousse, 1968.

[10] P. Madet, Une expérience du contraire, op. cit., p. 81.

 

 

Vers l'ouvrage