Brève sur Les noeuds de la parole par Philippe Madet

À propos des Noeuds de la parole, de Marc Strauss, une brève par Philippe Madet

 

Alors que la parole est bien souvent inaudible, noyée dans le flot des images qui nous envahissent ou absorbée dans les bruits qui nous entourent, la force de ce livre est de la remettre au centre des sujets que nous sommes — parlêtres, a si justement dit Lacan —, et des fils ou nœuds humains qui nous relient.
Dès lors, son champ est vaste.
La parole est cause, tout autant qu’elle nous traverse ; elle prend différents usages, tout autant qu’elle produit des effets divers.
C’est une traversée qui nous est ici proposée : des liens qui la nouent au dire, à l’amour, au père, aux discours…, des questions qu’elle soulève dans notre époque.
Pour en comprendre les nœuds, au fil des pages vous croiserez Freud dont l’intuition géniale a été de donner la parole aux analysants, Lacan, mais aussi Cantor, l’Homme aux rats, Grothendieck, les surréalistes, Aznavour, Joyce, Dora, Einstein, et d’autres encore, y compris l’adjudant qui encadra la section de l’auteur lorsqu’il fit ses classes, et qui montre remarquablement combien la parole est un pharmakon. Libératrice, elle peut aussi avoir pour visée d’empêcher. Nœud qui fait tenir, elle peut être nœud qui coince.
Bien plus qu’un outil de communication, on y apprend comment la parole frappe, comment elle engage les corps, comment, pour avoir des effets dans le réel, elle suppose d’y mettre du sien.
Vaste champ, vaste programme.
Il est bien sûr possible de parler pour ne rien dire mais, quoiqu’on dise, et Marc Strauss nous en donne la preuve, nous en déplie une argumentation : il se passe quelque chose avec la parole, on ne parle pas n’importe comment.

Philippe Madet

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